Rêves de poussières
Un film de Laurent Salgues
Année: 2006
Pays de production: Burkina Faso/ France / Canada
Avec : Makena Diop, Rasmane Ouedraogo, Fatou Tall-Salgues, Joseph B. Tapsoba, Souleymane Zouré.
Durée : 86min, sorti en France le 20 février 2008
Le Jeudi 28 février 2008 à 20h au cinéma Plazza Victor Hugo de Besançon
Note APACA :
Ce film a été identifié lors du dernier Fespaco par nos deux ambassadrices. Makéna Diop est connu du public de « lumières d’Afrique » car il tenait le rôle principal de « Oh Hero » présenté en compétition en 2005.
Synopsis :
Afin d'échapper à la misère, Mocktar Dicko, un paysan nigérien, vient chercher du travail à Essakane, une mine d'or au nord-est du Burkina Faso. Dans cette prison aux barreaux de vent et de poussière, il espère oublier un passé qui le hante.
Critique :
Mocktar interprété par Makena Diop arrive dans l'univers de la mine seul, démuni. Avec lui, on plonge dans les boyaux d'une mine d'or artisanale et bien sûr, dangereuse, effrayante. Ensuite, on se frotte aussi aux rapports de force qui gouvernent cette mine. Il y a les exploiteurs et ceux qui sont exploités. Mais, cynisme de la vie, lorsque le chef disparait, l'un des exploités va prendre sa place et reprendre toutes ses attitudes, reproduire sa cruauté. Un constat âpre et sans concession.
Le film ne décrit pas que les relations d'exploitation. Il montre également la solidarité entre les hommes de la mine. Il est attentif à la précision des gestes, à l'intensité des échanges de regard, aux petits groupes qui se forment. Il fait éprouver la fatigue, l'épuisement et met en valeur le petit échange qui va donner sens à toute une journée de labeur. Il laisse aussi une part de rêve et la possibilité d'une rencontre amoureuse. Elle sera aussi pudique que mythique. Laurent Salgues a su magnifier la beauté très sahélienne de son épouse, Fatou Tall-Salgues, drapée dans des voiles gracieux et énigmatiques, qui interprète la jeune villageoise vivant aux alentours de la mine avec laquelle notre mineur va se lier d'amour. Mocktar est un amoureux pudique. Pudique, le film l'est aussi, bien sûr. Simple, silencieux, le jeu de Makena Diop est intériorisé, toute en densité, en profondeur. Laurent Salgues le filme dans le corps à corps physique avec la mine. Il suit aussi son humanité, sa capacité à s'émouvoir. Il montre la naissance des sentiments dans un contexte si âpre. C'est un film du désert, un film où l'on parle peu, où chaque geste est chargé de sens, où face à la dureté d'un système, chacun tente de tenir, tout simplement. Sans exotisme aucun, sans lyrisme inutile, sans manichéisme, c'est un hymne à l'ouvrier du monde entier, qui creuse pour sa survie, au risque de sa vie. Un message qui est donc aussi politique que le film atteint à une véritable grâce esthétique.
Caroline Pochon pour Clap Noir